Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/49

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si petits mais si vifs, attaquent hardiment les oiseaux de proie. « C’est un des plus amusants spectacles que de les voir attaquer une buse, un milan, un corbeau ou un aigle. On sent qu’ils sont sûrs de la victoire et on voit la rage de l’oiseau de proie. Dans ces circonstances ils se soutiennent admirablement les uns les autres et leur courage croît avec leur nombre[1]. » Le vanneau a bien mérité le nom de « bonne mère » que les Grecs lui donnaient, car il ne manque jamais de protéger les autres oiseaux aquatiques contre les attaques de leurs ennemis. Il n’est pas jusqu’aux petits hochequeues blancs (Motacilla alba) si fréquents dans nos jardins et dont la longueur atteint à peine vingt centimètres, qui ne forcent l’épervier à abandonner sa chasse. « J’ai souvent admiré leur courage et leur agilité, écrit le vieux Brehm, et je suis persuadé qu’il faudrait un faucon pour capturer l’un d’eux. Quand une bande de hochequeues a forcé un oiseau de proie à la retraite, ils font résonner l’air de leurs cris triomphants, puis ils se séparent. » Ainsi ils se réunissent dans le but déterminé de donner la chasse à leur ennemi, de même que nous voyons les oiseaux d’une forêt s’assembler à la nouvelle qu’un oiseau nocturne est apparu pendant le jour et tous ensemble — oiseaux de proie et petits chanteurs inoffensifs — donnent la chasse à l’intrus pour le faire rentrer dans sa cachette.

Quelle différence entre la force d’un milan, d’une buse, ou d’un faucon et celle des petits oiseaux tels que la bergeronnette, et cependant ces petits oiseaux, par leur action commune et leur courage se montrent supérieurs à ces pillards aux ailes et aux armes puissantes ! En Europe, les bergeronnettes

  1. Brehm, IV, 567.