Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bien vite ; lorsqu’il n’aura plus de servantes pour ranger ses vingt chambres, sa bourgeoise sera enchantée de se débarrasser de la moitié de son appartement.


— « Mais ce sera un bouleversement complet », vont s’écrier les défenseurs de l’ordre. « Des déménagements à n’en plus finir ! Autant vaudrait jeter tout le monde dans la rue et tirer les appartements au sort ! » — Eh bien, nous sommes persuadés que si aucune espèce de gouvernement ne s’en mêle, et que si toute la transformation reste confiée aux mains des groupes surgis spontanément pour cette besogne, les déménagements seront moins nombreux que ceux qui se font dans l’espace d’une seule année par suite de la rapacité des propriétaires.

Il y a, d’abord, dans toutes les villes considérables un si grand nombre d’appartements inoccupés, qu’ils suffiraient presque à loger la plupart des habitants des taudis. Quant aux palais et aux appartements somptueux, beaucoup de familles ouvrières n’en voudraient même pas : on ne peut s’en servir s’ils ne sont entretenus par une nombreuse valetaille. Aussi, leurs occupants se verraient-ils bientôt forcés de chercher des habitations moins luxueuses, où mesdames les banquières feraient elles-mêmes la cuisine. Et peu à peu, sans qu’il y ait à accompagner le banquier, sous escorte de piques, dans une mansarde, et l’habitant de la mansarde dans le palais du banquier, la population se répartira à l’amiable dans les logements existants, en faisant le moins de remue-ménage possible. Ne voit-on pas les communes agraires se distribuer les champs, en dérangeant si peu les possesseurs de parcelles, qu’il reste seulement