Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/165

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numents publics doit être d’une pure forme artistique.

Mais cela ne pourra se réaliser que dans une société où tous jouiront de l’aisance et du loisir. Alors on verra surgir des associations d’art où chacun pourra faire preuve de ses capacités ; car l’art ne saurait se passer d’une infinité de travaux supplémentaires purement manuels et techniques. Ces associations artistiques se chargeront d’embellir les foyers de leurs membres, comme ont fait ces aimables volontaires, les jeunes peintres d’Édimbourg, en décorant les murs et les plafonds du grand hôpital des pauvres de la cité.

Tel peintre ou tel sculpteur qui aura produit une œuvre de sentiment personnel, toute d’intimité, l’offrira à la femme qu’il aime ou à un ami. Faite avec amour, son œuvre sera-t-elle inférieure à celles qui satisfont aujourd’hui la gloriole des bourgeois et des banquiers, parce qu’elles ont coûté beaucoup d’écus ?


Il en sera de même pour toutes les jouissances que l’on cherche en dehors du nécessaire. Celui qui voudra un piano à queue entrera dans l’association des fabricants d’instruments de musique. Et en lui donnant une partie de ses demi-journées de loisir, il aura bientôt le piano de ses rêves. S’il se passionne pour les études astronomiques, il rejoindra l’association des astronomes, avec ses philosophes, ses observateurs, ses calculateurs, ses artistes en instruments astronomiques, ses savants et ses amateurs, et il aura le télescope qu’il désire en fournissant une part de travail à l’œuvre commune, car c’est le gros ouvrage surtout que demande un observatoire astronomique : travaux de maçon, de menuisier, de fondeur, de méca-