Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/216

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Aussi pourrions-nous nous borner à répondre ce que nous avons répété tant de fois à propos de l’autorité en général : « Pour éviter un mal possible, vous avez recours à un moyen qui, lui-même, est un plus grand mal, et qui devient la source de ces mêmes abus auxquels vous voulez remédier. Car, n’oubliez pas que c’est le salariat, — l’impossibilité de vivre autrement qu’en vendant sa force de travail, — qui a créé le système capitaliste actuel, dont vous commencez à reconnaître les vices. »

Nous pourrions aussi remarquer, que ce raisonnement est après coup un simple plaidoyer pour excuser ce qui existe. Le salariat actuel n’a pas été institué pour obvier aux inconvénients du communisme. Son origine, comme celle de l’État et de la propriété, est tout autre. Il est né de l’esclavage et du servage imposés par la force, dont il n’est qu’une modification modernisée. Aussi cet argument n’a-t-il pas plus de valeur que ceux par lesquels on cherche à excuser la propriété et l’État.

Nous allons examiner cette objection cependant et voir ce qu’elle pourrait avoir de juste.


Et d’abord, n’est-il pas évident que si une société fondée sur le principe du travail libre était réellement menacée par les fainéants, elle pourrait se garer, sans se donner une organisation autoritaire ou recourir au salariat ?

Je suppose un groupe d’un certain nombre de volontaires, s’unissant dans une entreprise quelconque pour la réussite de laquelle tous rivalisent de zèle, sauf un des associés qui manque fréquemment à son poste ; devra-t-on à cause de lui dissoudre le groupe, nommer un président qui imposera des amendes, ou