Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/248

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que chose — les besoins des producteurs. — Et ils s’empressent de les reconnaître. Seulement, c’est à l’État de les apprécier ; à l’État de vérifier si les besoins ne sont pas disproportionnés aux œuvres.

L’État fera l’aumône. De là, à la loi des pauvres et au workhouse anglais, il n’y a qu’un pas.

Il n’y a plus qu’un seul pas, parce que même cette société marâtre contre laquelle on se révolte, s’est aussi vu forcée de tempérer son principe d’individualisme ; elle a aussi dû faire des concessions dans un sens communiste et sous la même forme de charité.

Elle aussi distribue des dîners d’un sou pour prévenir le pillage de ses boutiques. Elle aussi bâtit des hôpitaux, — souvent très mauvais, mais quelquefois splendides, — pour prévenir le ravage des maladies contagieuses. Elle aussi, après n’avoir payé que les heures de travail, recueille les enfants de ceux qu’elle a réduits à la dernière des misères. Elle aussi tient compte des besoins — par la charité.


La misère — avons-nous dit ailleurs — fut la cause première des richesses. Ce fut elle qui créa le premier capitaliste. Car, avant d’accumuler « la plus-value » dont on aime tant à causer, encore fallait-il qu’il y eût des misérables qui consentissent à vendre leur force de travail pour ne pas mourir de faim. C’est la misère qui a fait les riches. Et si les progrès en furent rapides dans le cours du moyen-âge, c’est parce que les invasions et les guerres qui suivirent la création des États et l’enrichissement par l’exploitation en Orient brisèrent les liens qui unissaient jadis les communautés agraires et urbaines et les amenèrent à proclamer, en lieu et place de la solidarité qu’elles