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Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/86

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et même en Égypte, il y a quatre mille ans ; puisqu’enfin, despotes, rois et empereurs ont toujours su jeter un morceau de pain au peuple pour avoir le temps de ramasser le fouet, — il est naturel que les gens « pratiques » préconisent cette méthode de perpétuer le salariat. À quoi bon se creuser la tête quand on dispose de la méthode essayée par les Pharaons d’Égypte !


Eh bien ! Si la Révolution avait le malheur de s’engager dans cette voie, elle serait perdue.

En 1848, lorsqu’on ouvrait les ateliers nationaux, le 27 février, les ouvriers sans travail n’étaient que huit mille à Paris. Quinze jours plus tard, ils étaient déjà 49,000. Ils allaient être bientôt cent mille, sans compter ceux qui accouraient des provinces.

Mais à cette époque, l’industrie et le commerce n’occupaient pas en France la moitié des bras qu’ils occupent aujourd’hui. Et l’on sait qu’en révolution ce qui souffre le plus, ce sont les échanges, c’est l’industrie. Que l’on pense seulement au nombre d’ouvriers qui travaillent, directement ou indirectement, pour l’exportation ; au nombre de bras employés dans les industries de luxe qui ont pour clientèle la minorité bourgeoise !

La révolution en Europe, c’est l’arrêt immédiat de la moitié, au moins, des usines et des manufactures. Ce sont des millions de travailleurs avec leurs familles jetés sur le pavé.

Et c’est à cette situation vraiment terrible que l’on chercherait à parer au moyen d’ateliers nationaux, c’est-à-dire, de nouvelles industries créées sur-le-champ pour occuper des désœuvrés !