Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/89

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— bref, ils consentiraient à certains sacrifices, pourvu qu’on leur laissât toujours le droit de gérer l’industrie et d’en prélever les bénéfices.


Le collectivisme, comme on le sait, apporte à ce régime des modifications importantes, mais n’en maintient pas moins le salariat. Seulement l’État, c’est-à-dire, le gouvernement représentatif, national ou communal, se substitue au patron. Ce sont les représentants de la nation ou de la commune et leurs délégués, leurs fonctionnaires qui deviennent gérants de l’industrie. Ce sont eux aussi qui se réservent le droit d’employer dans l’intérêt de tous la plus-value de la production. En outre, on établit dans ce système une distinction très subtile, mais grosse de conséquences, entre le travail du manœuvre et celui de l’homme qui a fait un apprentissage préalable : le travail du manœuvre n’est aux yeux du collectiviste qu’un travail simple ; tandis que l’artisan, l’ingénieur, le savant, etc. font ce que Marx appelle un travail composé et ont droit à un salaire plus élevé. Mais manœuvres et ingénieurs, tisserands et savants sont salariés de l’État, — « tous fonctionnaires », disait-on dernièrement pour dorer la pilule.


Eh bien, le plus grand service que la prochaine Révolution pourra rendre à l’humanité sera de créer une situation dans laquelle tout système de salariat deviendra impossible, inapplicable, et où s’imposera comme seule solution acceptable, le Communisme, négation du salariat.

Car en admettant que la modification collectiviste soit possible, si elle se fait graduellement pendant une période de prospérité et de tranquillité (nous