Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/102

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est inconcevable », disent les mêmes rapports. Ce même jour, dit le libraire Hardy dans son journal, il s’en est fallu de bien peu qu’il partît, « vers les huit heures du soir, une multitude de furieux, du jardin du Palais-Royal », pour dégager les députés du Tiers que l’on disait exposés à être assassinés par les nobles. Dès ce jour, on parlait d’enlever les armes aux Invalides.

La fureur contre la Cour marchait de pair avec les fureurs inspirées par la disette. En effet, le 4 et le 6, on prévoyait le pillage des boulangeries ; des patrouilles de gardes-françaises circulaient dans les rues, dit Hardy, et elles surveillaient la distribution du pain.

Le 8 juillet, un prélude de l’insurrection éclatait à Paris même, dans le camp de vingt mille ouvriers sans travail que le gouvernement occupait à faire des terrassements à Montmartre. Deux jours après, le 10, le sang coulait déjà, et ce même jour les barrières commençaient à flamber. Celle de la Chaussée-d’Antin était incendiée, et le peuple en profitait pour faire entrer des provisions et du vin sans payer d’octroi.

Est-ce que Camille Desmoulins aurait jamais fait, le 12, son appel aux armes s’il n’eût pas été sûr qu’il serait entendu — s’il n’eût pas su que Paris se soulevait déjà ? que douze jours auparavant Loustalot avait soulevé la foule sur un fait de moindre importance, et que maintenant le Paris des faubourgs n’attendait plus que le signal, l’initiative, pour s’insurger ?


La fougue des princes, sûrs du succès, avait précipité le coup d’État, préparé pour le 16, et le roi fut forcé