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révoltes commencèrent après le 4 août. Un droit de « coupe » était prélevé en nature – tant par setier – dans cette ville, sur tous les blés de provenance étrangère à la province. C’était un droit féodal, que le roi affermait à des particuliers. Aussi, dès qu’on apprit à Castres, le 19 août, la nouvelle de la nuit du Quatre, le peuple se souleva, exigeant l’abolition de ce droit, et immédiatement la bourgeoisie, qui dès le 5 août avait constitué la garde nationale, forte de 600 hommes, se mit à rétablir « l’ordre ». Mais dans les campagnes, l’insurrection roulait de village en village et les châteaux de Gaix, de Montlédier, la chartreuse de Faix, l’abbaye de Vielmur, etc., furent pillés et les chartriers détruits[1].

En Auvergne, les paysans prirent beaucoup de précautions pour mettre le droit de leur côté, et lorsqu’ils venaient au château brûler les chartriers, ils ne manquaient pas de dire au seigneur qu’ils le faisaient par ordre du roi[2]. Mais dans les provinces de l’Est ils ne se gênaient pas de déclarer ouvertement que le temps était

  1. Anacharsis Combes, Histoire de la ville de Castres et de ses environs pendant la Révolution française, Castres, 1875.
  2. M. Xavier Roux, qui a publié en 1891 sous ce titre : Mémoire sur la marche des brigandages dans le Dauphiné, en 1789, les dépositions complètes d’une enquête faite en 1789 sur ce sujet, attribue tout le mouvement à des meneurs : « Appeler le peuple à se révolter contre le Roi n’aurait pas abouti », dit cet auteur… « On y arriva par détour. L’on prit et l’on exécuta sur toute la surface du territoire un plan singulièrement hardi. Il se résume en ces mots : ameuter au nom du roi le peuple contre les seigneurs ; les seigneurs une fois renversés, se précipiter sur le trône, désormais sans défense, et le briser (p. IV de l’introduction) ». Eh bien ! nous relevons cet aveu de M. Roux lui-même : Toutes les enquêtes faites n’ont jamais amené « à savoir le nom d’un seul meneur. » (p. V). Le peuple entier entrait dans cette conspiration.