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d’après laquelle la troupe ou la milice pourrait être appelée, et dans ce cas « la dictature royale » devait être proclamée dans la localité. La bourgeoisie prit ombrage de cette clause, et après de longues discussions, on laissa aux municipalités bourgeoises le soin de proclamer la loi martiale, de se prêter mutuellement main-forte, sans déclarer la dictature royale. En outre, les communautés de village furent rendues responsables des dommages que pouvait subir le seigneur, si elles n’avait pas fusillé et pendu à temps les paysans qui refusaient de payer les droits féodaux.

La loi du 18 juin 1790 confirmait tout cela. Tout ce qui avait une vraie valeur dans les droits féodaux, tout ce qui pouvait être représenté, par toute sorte de finasseries légales, comme se rattachant à la possession de la terre, devait être payé, comme auparavant. Et quiconque refusait, était contraint par la fusillade et la potence, rendues obligatoires. Parler contre le paiement des droits féodaux devenait déjà un crime, que l’on payait de sa tête si la loi martiale était proclamée[1].

Tel fut l’héritage de l’Assemblée Constituante, dont on nous a dit de si belles choses. Car tout cela resta tel quel, jusqu’en 1792. On ne s’occupa plus des droits féodaux que pour préciser certaines règles du rachat des redevances féodales, se plaindre de ce que per-

  1. Robespierre prononça dans cette discussion une parole très juste, dont les révolutionnaires de tous les pays pourront se souvenir : Lorsqu’on cherchait à exagérer autant que possible les terreurs du soulèvement des paysans : « Moi, j’atteste, s’écria-t-il, que jamais révolution n’a coûté si peu de sang et de cruauté ! » Le sang, en effet, vint plus tard, par la contre-révolution.