Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/304

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venus sur la grand’route pour recevoir la voiture royale au Pont-de Somme-Vesle, mais qui, ne la voyant pas venir et craignant l’hostilité du peuple, se sont retirés dans les bois. Drouet et Guillaume parviennent cependant à éviter ces patrouilles en suivant les sentiers, qu’ils connaissent, mais ils ne rejoignent la voiture royale qu’à Varennes, où un délai imprévu l’avait retenue, – le relais et les hussards ne se trouvant pas à l’endroit précis du rendez-vous désigné, – et là, Drouet, prenant un peu les devants, a juste le temps de courir chez un ami, un cabaretier. – Es-tu bon patriote, toi ? – Je crois bien ! – Alors, allons arrêter le roi !

Et ils barrent d’abord, sans bruit, le chemin à la lourde berline royale, en plaçant en travers du pont de l’Aire une voiture chargée de meubles, qui par hasard se trouvait là. Puis, suivis de quatre ou cinq citoyens, armés de fusils, ils arrêtent les fugitifs au moment même où leur voiture, descendant de la Ville Haute vers le pont de l’Aire, s’engage sous la voûte de l’église Saint-Gençoult[1].

  1. Il paraît fort possible, d’après les documents authentiques recueillis et analysés par M. G. Lenôtre (Le Drame de Varennes : juin 1791, Paris, 1905, pp. 151 et suivantes), que Drouet n’ait eu d’abord que des soupçons concernant les voyageurs ; qu’il hésitait, et qu’il ne se lança dans sa course à travers bois que lorsque ses soupçons furent confirmés par Jean de Lagny. Ce garçon de treize ans, fils du maître de poste de Chantrix, J.-B. Lagny, arriva à Sainte-Menehould après une course à fond de train, apportant l’ordre d’arrêter la berline royale, signé par Bayon – un des volontaires envoyés de Paris, le matin du 21 juin, par Lafayette à la poursuite du roi. Bayon, après avoir franchi trente-cinq lieues en six heures, en changeant dix fois de chevaux, n’en pouvait probablement plus et, s’arrêtant pour un moment à Chantrix, se hâta d’envoyer « devant lui un courrier ». Il est fort probable aussi (même ouvrage, pp. 62 et 63) que Louis XVI fut déjà