Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/346

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mesures de sûreté générale à prendre. À l’instigation de la Cour, Lamourette, évêque de Lyon, proposa, par motion d’ordre, une réconciliation générale des partis, et, pour y parvenir, il indiqua un moyen bien simple : « Une partie de l’Assemblée attribue à l’autre le dessein séditieux de vouloir détruire la monarchie. Les autres attribuent à leurs collègues le dessein de vouloir la destruction de l’égalité constitutionnelle, et le gouvernement aristocratique connu sous le nom des deux Chambres. Eh bien ! foudroyons, Messieurs, par une exécration commune et par un irrévocable serment, foudroyons et la République et les deux Chambres ! » Sur quoi, emportée par un subit mouvement d’enthousiasme, l’Assemblée se lève tout entière pour attester sa haine et de la République et des deux Chambres. Les chapeaux volent en l’air, on s’embrasse, le côté droit et le côté gauche fraternisent, et une députation est sur-le-champ envoyée au roi, qui vient s’associer à l’allégresse générale. Cette scène s’appelle, dans l’histoire, « le baiser Lamourette ». Heureusement, l’opinion publique ne se laissait pas prendre par de pareilles scènes. Le soir même, aux Jacobins, Billaud-Varennes protesta contre cet hypocrite rapprochement, et il fut décidé d’envoyer son discours aux sociétés affiliées. De son côté, la Cour ne voulait nullement désarmer. Pétion, maire de Paris, avait été suspendu le même jour de ses fonctions, par le directoire (royaliste) du département de la Seine, pour négligence au 20 juin. Mais alors Paris se passionna pour son maire. Une agitation menaçante se produisit, si bien que six jours plus tard, le 13, l’Assemblée dut lever la suspension.