Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/369

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mais ne rien payer et ne rien racheter. C’est ce que les paysans ne manquèrent pas de faire, en attendant quelque nouvelle victoire du peuple et quelque nouvelle concession de la part des gouvernants.

En même temps toutes les dîmes et prestations (travail gratuit) qui provenaient du servage — de la mainmorte — étaient supprimées sans indemnité. C’était encore quelque chose de gagné : si l’Assemblée protégeait les seigneurs et les acquéreurs bourgeois, elle livrait, du moins, les prêtres, depuis que le roi n’était plus là pour les protéger.

Mais, du coup, cette même Assemblée prenait une mesure qui, si elle avait été appliquée, aurait soulevé toute la France paysanne contre la République. La Législative abolissait la solidarité pour les paiements qui existait dans les communes paysannes[1], et en même temps elle ordonnait la division des biens communaux entre les citoyens (proposition de François de Neufchâteau). Il paraît cependant que ce décret, exprimé en quelques lignes dans des termes très vagues, — une déclaration de principe plutôt qu’un décret — ne fut jamais pris au sérieux. Son application se serait heurtée d’ailleurs à de telles difficultés qu’il resta lettre morte ; et quand la question fut soulevée de nouveau, la Législative, qui arrivait déjà à son terme, se sépara sans rien décider.

En ce qui concerne les biens des émigrés, il fut ordonné de les mettre en vente en petits lots, de deux, trois, ou au plus quatre arpents. Et cette vente

  1. Il s’agissait évidemment de ce qui existe en Russie sous le nom de krougovaïa porouka, « responsabilité en rond ».