Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/43

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été dépouillées ; nous n’apprenons qu’accidentellement qu’en tel endroit il y a eu des « désordres ». À Paris, par exemple, après l’abolition des jurandes (1776) et un peu partout en France dans le courant de la même année, à la suite de faux bruits répandus sur l’abolition de toutes les obligations de corvée et de taille envers les seigneurs, il y eut des émeutes assez sérieuses. Cependant il semblerait aussi, d’après les documents imprimés que j’ai étudiés, que dans les années 1777 à 1783 il y eut diminution d’émeutes — peut-être la guerre d’Amérique y fut-elle pour quelque chose.

En 1782 et 1783 les émeutes recommençaient de nouveau, et dès lors elles allèrent en augmentant jusqu’à la Révolution. Poitiers était en révolte en 1782 ; en 1786, c’était Vizille ; de 1783 à 1787 c’est dans les Cévennes, le Vivarais et le Gévaudan qu’éclatent les émeutes. Les mécontents, que l’on nommait mascarats, voulant punir les « praticiens » qui semaient la discorde entre paysans pour provoquer des procès, firent irruption dans les tribunaux, chez les notaires et les procureurs, et brûlèrent tous les actes, tous les contrats. On pendit trois meneurs, on envoya les autres aux travaux forcés, mais les désordres reprirent de nouveau, dès que la fermeture des parlements en fournit une nouvelle occasion[1]. En 1786, c’est Lyon qui est en révolte (Chassin, Génie de la Révolution). Les tisserands en soie font grève ; on leur promet une augmentation de salaires — et l’on fait venir la troupe ; sur quoi il y a bataille, et l’on pend trois meneurs.

  1. C. de Vic et J. de Vaissete, Histoire générale du Languedoc, continuée par Du Mège, 10 volumes, 1840-1846.