Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/503

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

soir, un repas civique, auquel une masse de gens prit part, était organisé à la veille de leur départ, en plein air, dans les rues. Mais ce n’était plus l’entrain juvénile de 1792. Une sombre énergie les animait, et la fureur rongeait le cœur des pauvres gens des faubourgs à la vue des luttes politiques qui déchiraient la France. « Il faut une émeute à Paris », aurait dit Danton, et, en effet, il en fallait une pour secouer la torpeur qui s’emparait du peuple, des sections.

Pour parer aux difficultés, vraiment terribles, qui enveloppaient la Révolution, pour subvenir aux immenses dépenses imposées à la France par la coalition des contre-révolutionnaires au dehors et à l’intérieur, il fallait que la Révolution mît à contribution les fortunes bourgeoises qui se formaient maintenant, grâce à la Révolution elle-même.

Or, c’est précisément ce que les gouvernants refusaient d’admettre, d’une part, par principe, — l’accumulation de grandes fortunes privées étant considérée comme le moyen d’enrichir la nation, et, d’autre part, il faut le reconnaître, à raison des craintes que leur inspirait un soulèvement plus ou moins général des pauvres contre les riches dans les grandes villes. Les journées de septembre — surtout celles du 4 et du 5, au Châtelet et à la Salpêtrière — étaient encore fraîches dans les mémoires. Que serait-ce donc si une classe — tous les pauvres — se soulevait contre une autre — contre tous les riches, toute la gent aisée ? C’était la guerre civile dans chaque cité. Et cela, avec la Vendée et la Bretagne à l’ouest, soutenues par l’Angleterre, par les émigrés de Jersey, le pape et tous les prêtres, — surtout au nord, les