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Aussi Necker n’osa-t-il jamais tenir auprès de Louis XVI le langage net, précis, sévère et audacieux qu’exigeait la situation. Il ne lui parla que très timidement du gouvernement représentatif et se borna à des réformes qui ne pouvaient ni résoudre les difficultés du moment, ni satisfaire personne, tandis qu’elles faisaient sentir à tous la nécessité d’un changement fondamental.

Les assemblées provinciales, dont Necker ajouta dix-huit à celles qui avaient été instituées par Turgot, et qui amenaient après elles les assemblées de district et de paroisse, furent forcées de discuter les problèmes les plus ardus et de mettre à nu les plaies affreuses du pouvoir illimité de la royauté. Et comme les discussions sur ces objets durent se répandre jusqu’aux villages, elles contribuèrent sans doute puissamment à la chute de l’ancien régime. Ainsi les assemblées provinciales, qui auraient pu servir de paratonnerre en 1776, aidaient déjà au soulèvement en 1788. De même le fameux Compte rendu sur l’état des finances, que Necker publia en 1781, peu de mois avant de quitter le pouvoir, fut un coup de massue porté à l’autocratie. Comme il arrive toujours en pareille occasion, Necker contribua ainsi à ébranler le régime qui déjà s’écroulait, mais il fut impuissant à empêcher que l’écroulement devînt une révolution : probablement il ne la voyait même pas venir.

Après le premier renvoi de Necker, c’était, de 1781 à 1787, la débâcle financière. Les finances se trouvaient dans un état si misérable que les dettes de l’État, des provinces, des ministères et même de la maison du roi s’accumulaient de façon inquiétante. À