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Les communes qui s’empressèrent, sans perdre un temps précieux, de reprendre leurs anciennes terres, de fait, sur place, eurent ces terres, et lorsque la réaction triompha et que les seigneurs rentrèrent en force, ils ne purent rien faire pour reprendre ce que la loi leur avait enlevé, et ce dont les paysans avaient déjà pris possession réelle. Quant aux communes qui hésitèrent à le faire, elles n’eurent rien.

Dès que la réaction eut raison des révolutionnaires, dès que l’insurrection des derniers montagnards, le 1er  prairial an III (20 mai 1795), fut vaincue, le premier soin de la Convention réactionnaire fut de casser les décrets révolutionnaires de la Convention montagnarde. Le 21 prairial an IV (9 juin 1796) un décret fut déjà lancé pour empêcher le retour des terres communales aux communes[1].

    voisins. Le tout serait fait par les directoires des départements (organes archi-réactionnaires, on le sait, représentant l’intérêt des riches). Ce projet, évidemment, ne fut pas accepté. Puisque les terres de chaque commune auraient été affermées, d’abord par les paysans pauvres ou riches de cette même commune, ce qui se faisait déjà par les communes elles-mêmes, et naturellement ne seraient pas louées par des habitants de districts voisins que par exception, le projet se réduisait, en pratique, à ceci : — Pour permettre à quelques exceptionnels bourgeois d’affermer des terres situées dans un district voisin de leur commune, l’État allait s’interposer au lieu des communes, dans l’administration des terres, et il allait remettre ce que les communes faisaient elle-mêmes, à des fonctionnaires, qui auraient favorisé évidemment quelques gros bourgeois de la province pour leur permettre de s’enrichir aux dépens des communes villageoises. C’est à quoi se réduisait ce plan. Il débute, il est vrai, par des idées de justice, attrayantes sans doute aux socialistes citadins qui, peu familiers avec ces questions foncières, n’y regardent pas de si près ; mais en réalité, il ne tendait qu’à créer, au nom de l’alignement étatiste, vingt autres injustices encore plus criantes et des sinécures sans nombre.

  1. « Considérant que l’exécution de la loi du 10 juin 1793 a donné lieu à de nombreuses réclamations ; »… que l’examen de ces