Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/566

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Et cependant, malgré tout cela, malgré tous les abus et toutes les spéculations, il se faisait des ventes considérables par petits lots. À côté des gros bourgeois qui s’enrichirent du coup par l’achat des biens nationaux, il y eut dans certaines parties de la France, surtout dans l’Est, des quantités considérables de terres qui passèrent (comme l’a montré Loutchitzky) par petits lots aux mains des paysans pauvres. Là, ce fut une vraie révolution accomplie dans le régime de la propriété.

Ajoutez aussi que l’idée de la Révolution était de frapper la classe des grands propriétaires et de détruire les grandes propriétés en abolissant le droit d’aînesse dans les successions. Pour cela, elle supprima d’abord, dès le 15 mars 1790, la succession féodale, par laquelle les seigneurs transmettaient leurs propriétés à un seul de leurs descendants, — généralement le fils aîné. L’année suivante (8-15 avril 1791) toute inégalité légale dans les droits d’héritage fut abolie. « Tous héritiers en égal degré succèdent par portions égales aux biens qui leur sont déférés par la loi. » Peu à peu le nombre des héritiers est agrandi, par l’adjonction des collatéraux et des enfants naturels, et enfin, le 7 mars 1793, la Convention abolissait « la faculté de disposer de ses biens, soit à cause de la mort, soit entre vifs, soit par donation contractuelle en ligne directe » ; « tous les descendants auront une part égale sur les biens des ascendants ».

C’était rendre obligatoire le morcellement des propriétés, du moins en cas d’héritage.