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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/571

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Les paysans, surtout ceux qui s’étaient emparés des terres, travaillaient dur. Jamais labour ne fut si énergique que celui de l’automne de 1791, dit Michelet. Et si les récoltes de 1791, 1792 et 1793 avaient été abondantes, le pain n’aurait pas manqué. Mais, depuis 1788, l’Europe et surtout la France traversaient une série de mauvaises années : hivers très froids, étés sans soleil. Au fond, il n’y eut qu’une bonne récolte, celle de 1793, et encore, dans la moitié seulement des départements. Ceux-ci avaient même un excédent de blé ; mais lorsque cet excédent, ainsi que les moyens de transport furent réquisitionnés pour les besoins de la guerre, ce fut la disette dans plus d’une moitié de la France. Le sac de blé, qui ne valait auparavant que 50 livres à Paris, monta à 60 livres en février 1793, et jusqu’à 100 et 150 livres au mois de mai.

Le pain, qui autrefois coûtait trois sous la livre, monta maintenant à six sous, et jusqu’à huit sous dans les petites villes autour de Paris. Dans le Midi, c’étaient des prix de famine : 10 à 12 sous la livre. À Clermont, dans le Puy-de-Dôme, en juin 1793, la livre de pain se payait de seize à dix-huit sous. « Nos montagnes sont dans la misère la plus affreuse. L’administration distribue un huitième de setier par personne, et chacun est obligé d’attendre deux jours pour avoir son tour, » lisons-nous dans le Moniteur du 15 juin 1793.

Comme la Convention ne faisait encore rien, ce furent, au commencement de 1793, dans huit départements, les attroupements et les émeutes qui entreprirent de taxer les denrées. Les commissaires de la Convention durent lors céder devant l’émeute et imposer les taxes