Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/668

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force immense, et que cette force avait été augmentée par l’appui qu’il trouva chez ceux mêmes sur lesquels la Révolution avait versé ses bienfaits. Pour briser cette force il fallait une nouvelle révolution, populaire, égalitaire, — et la grande masse des révolutionnaires de 1789-1792 n’en voulait pas.

La majorité de la bourgeoisie, qui avait été révolutionnaire en 1789-1792, croyait maintenant que la Révolution était allée « trop loin. » Saurait-elle empêcher les « anarchistes » de « niveler les fortunes » ? Ne donnerait-elle pas aux paysans trop de bien-être, si bien qu’ils refuseraient de travailler pour les acheteurs de biens nationaux ? Où trouverait-on alors les bras pour mettre ces biens en rapport ? Car si les acheteurs avaient versé des millions au Trésor pour acheter les biens nationaux, c’était bel et bien pour les faire valoir ; et que ferait-on s’il n’y avait plus de prolétaires inoccupés dans les villages ?

Le parti de la Cour et des nobles avait maintenant pour alliés toute une classe d’acheteurs des biens nationaux, de bandes noires, de fournisseurs militaires et d’agioteurs. Ceux-là avaient fait fortune et ils avaient hâte maintenant de jouir, de mettre fin à la révolution, à une seule condition — celle que les biens achetés et les fortunes amassées ne leur fussent pas enlevés. Toute une masse de petits bourgeois, d’origine récente, les soutenait dans les villages. Et tout ce monde s’intéressait fort peu à la forme de gouvernement, pourvu qu’il fût fort, pourvu qu’il sût contenir les sans-culottes et résister à l’Angleterre, l’Autriche, la Prusse, qui pourraient faire restituer les biens