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La structure d’esprit de Robespierre se prêtait à merveille à ce rôle. Qu’on relise, en effet, le brouillon qu’il écrivit pour l’acte d’accusation du groupe de Fabre d’Églantine et de Chabot, retrouvé dans ses papiers après le 9 thermidor[1]. Cet écrit caractérise l’homme, mieux que tous les raisonnements.

« Deux coalitions rivales luttent depuis quelque temps avec scandale » — c’est ainsi qu’il commence. « L’une tend au modérantisme, et l’autre aux excès pratiquement contre-révolutionnaires. L’une déclare la guerre à tous les patriotes énergiques, prêche l’indulgence pour les conspirateurs ; l’autre calomnie sourdement les défenseurs de la liberté, veut accabler au détail tout patriote qui s’est une fois égaré, en même temps qu’elle ferme les yeux sur les trames criminelles de nos plus dangereux ennemis… L’une cherche à abuser de son crédit ou de sa présence à la Convention nationale [les Dantoniens] ; l’autre de son influence dans les sociétés populaires [la Commune, les Enragés]. L’une veut surprendre à la Convention des décrets dangereux ou des mesures oppressives contre ses adversaires ; l’autre fait entendre des cris dangereux dans les assemblées publiques… Le triomphe de l’un ou de l’autre parti serait également fatal à la liberté et à l’autorité nationale ». — Et il dit comment les deux partis attaquèrent le Comité de salut public dès sa fondation.

  1. Pour l’accusation de ce groupe, c’est Robespierre qui avait préparé les brouillons. Il fit prononcer l’accusation par Saint-Just. Voyez ce brouillon dans les Papiers inédits trouvés chez Robespierre, Saint-Just, Payan, etc., supprimés ou omis par Courtois, précédés du rapport de ce dernier à la Convention nationale. Paris, 1828, t. 1, pp. 21 et suivantes.