ces villages est tel, qu’en quelques années la France devient le pays des paysans aisés, et bientôt on découvre que malgré toutes les saignées, toutes les pertes, elle est le pays le plus riche de l’Europe par sa productivité. Ses richesses, elle les tire, non des Indes ou du commerce lointain, mais de son sol, de son amour du sol, de son habileté et de son industrie. C’est le pays le plus riche par la subdivision de ses richesses ; et plus riche encore par les possibilités qu’il offre pour l’avenir.
Tel est l’effet de la Révolution. Et si un regard distrait ne voit dans la France napoléonienne que l’amour de la gloire, l’historien y découvre que les guerres mêmes que la France supporte dans cette période, elle le fait pour s’assurer les fruits de la Révolution : les terres reprise aux seigneurs, aux prêtres, aux riches, les libertés reprises au despotisme, à la Cour. Si la France est prête à se saigner à blanc, seulement pour empêcher que les Allemands, les Anglais et les Russes lui imposent un Louis XVIII, c’est parce qu’elle veut empêcher que le retour des émigrés royalistes signifie la reprise par les « ci-devant » des terres, déjà arrosées de la sueur des paysans, des libertés, déjà arrosées par le sang des patriotes. Et elle lutte si bien, pendant vingt-trois ans, que lorsqu’elle est forcée de recevoir les Bourbons, elle leur impose des conditions : les Bourbons pourront régner, mais les terres resteront à ceux qui les ont reprises aux seigneurs féodaux ; même la Terreur Blanche des Bourbons n’osera y toucher. L’ancien régime ne sera pas rétabli.
Voilà ce que l’on gagne à faire une Révolution.