Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/400

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Il y a un autre trait de la science moderne qui rend plus impérieuse encore la réforme que nous préconisons. Alors que l'industrie, surtout à la fin du dix-huitième siècle et pendant la première partie du dix-neuvième, a multiplié ses inventions au point de bouleverser et métamorphoser la face même du globe, la science a perdu ses facultés inventives. Les hommes de science n'inventent plus du tout, ou peu s'en faut. N'est-ce pas frappant que la machine à vapeur, même dans ses principes fondamentaux, la locomotive, le navire à vapeur, le téléphone, le phonographe, le métier à tisser, la machine à faire la dentelle, les phares, le macadam, la photographie en noir et en couleurs, la phototypie et des milliers de choses moins importantes n'ont point été inventés par des professionnels de la science. Et cependant aucun d'eux n'eût refusé d'associer son nom à l'une quelconque de ces inventions. Des hommes qui avaient reçu à l'école une instruction des plus rudimentaires, qui n'avaient pu que ramasser les miettes de savoir tombées de la table des riches, et qui se trouvaient réduits aux moyens les plus primitifs pour faire leurs expériences, — le clerc d'avoué Smeaton, Watt, le fabricant d'instruments, Stephenson, le serre-frein, Fulton, l'apprenti bijoutier, Rennie, l'ajusteur de moulins, Telford, le maçon, et des centaines d'autres dont les noms même resteront inconnus, furent, comme dit très justement