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LETTRE XXVII

Venise, le…

Le comte, tu le sais déjà, redoute pour Valérie les courses qu’elle fait à Lido ; mais il finit toujours par céder : ses affaires l’occupent, et c’est moi qui l’ai accompagnée, avec Marie, ces jours-ci. Nous y allâmes la semaine passée. Sa douce confiance m’enchante. Elle est si sûre que ce qu’elle désire ne trouvera jamais d’opposition de ma part qu’elle ne demande pas : « Pouvez-vous venir avec moi ? » mais elle me dit : « N’est-ce pas, Gustave, vous viendrez avec moi ? »

J’ai été à Lido en son absence, j’y ai apporté des arbustes enlevés avec soin d’un jardin, et qui ont continué à fleurir ; j’ai planté des saules d’Amérique et des roses blanches auprès du tombeau d’Adolphe. Valérie étoit fort triste le jour que nous devions y aller ensemble. En débarquant à Lido, je la voyois oppressée ; elle paroissoit souffrir beaucoup ; ses yeux étoient mélancoliquement baissés vers la terre. Nous arrivâmes à l’enceinte du couvent ; nous passâmes par une grande cour abandonnée, où l’herbe haute et flétrie par la sécheresse embarrassoit nos pas. La journée étoit encore fort chaude, quoique nous fussions déjà à la fin d’octobre. Une des sœurs du couvent vint nous ouvrir la porte qui donnoit sur le petit ter-