Page:Krudener - Valerie.djvu/25

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aimée. On lui pardonnera facilement de s’y faire un rôle tout idéal et de se présenter au lecteur avec une auréole de pureté qu’elle ne porta pas toujours dans la vie réelle : en effet, après s’être éprise des cinquante ans de Suard, elle conçut, en 1801, une violente passion pour le talent du chanteur Garat ;passion malheureuse, qui finit par trouver un outrageant dédain chez l’objet aimé, et à la suite de laquelle la sentimentale baronne renonça pour toujours aux faiblesses du cœur et des sens.

Plus que toute autre la baronne de Krûdener a subi ce charme irrésistible qui n’a jamais cessé d’attirer les étrangers vers la France. Aussi est-ce en français qu’elle écrivit son roman de Valérie, et l’on est vraiment émerveillé de la facilité avec laquelle elle sut manier une langue qui n’était pas la sienne. Elle fit plusieurs séjours à Paris. C’est pendant le second, qui commença en 1801, que parut Valérie (1803). Le roman ne plut pas à Napoléon, dont Mme de Krüdener ambitionnait l’approbation. Elle en conçut un grand ressentiment, et se trouva ainsi toute préparée à entrer dans le mouvement de réaction germanique qui se dessinait contre le maître des destinées de la France, et qui s’accentua davantage après l’assassinat du duc d’Enghien. Mme de Krüdener retourna alors en Allemagne. Elle s’y lia avec la reine de Prusse, qu’elle eut la douleur de voir mourir bientôt. Le chagrin qu’elle ressentit de cette perte la