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Page:Kufferath - L’Art de diriger l’orchestre, 1890.djvu/103

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l’orchestre

tein et Rymski-Korsakoff à St-Pétersbourg, sont sans exception des non-violonistes. Berlioz et Wagner qui passaient en leur temps pour d’incomparables capellmeister, n’ont jamais touché un violon. M. Gounod qui est, lui aussi, un remarquable conducteur n’est pas, que je sache, un virtuose de l’archet. Il est vrai qu’à l’Opéra de Paris et à l’Opéra-Comique la tradition des chefs d’orchestre-violonistes s’est maintenue jusqu’ici ; mais c’est peut-être à cause de cela que dans ces deux établissements on entend si rarement de bonne musique bien exécutée, malgré l’excellence des orchestres.

Le violon ne fait rien à l’affaire. Le chef d’orchestre idéal devrait même n’être jamais un virtuose au sens propre du mot ; ni violoniste, ni pianiste, pas même flûtiste. Musicien, voilà la première et l’ultime condition : que le chef d’orchestre soit un vrai musicien, qu’il sache ce qu’est l’art de la composition et qu’il sache aussi ce que sont tous les instruments de l’orchestre. C’est là l’important. Après tout, l’orchestre est son instrument à lui, et il va de soi que pour « jouer sur ce clavier » il est indispensable qu’il en connaisse toutes les touches.

M. Hans Richter est, à ces égard, l’artiste le plus complet que j’aie rencontré. Il est véritablement musicien jusqu’aux moelles. On sait les anecdotes piquantes qui courent sur sa jeunesse, lorsqu’engagé à l’orchestre de Munich, il passa successivement des instruments à vent (il jouait du cor !) au pupitre des violons puis sur la scène parmi les chanteurs, prêt à toutes les besognes et se tirant toujours d’affaire.

Quand, en 1862, il seconda Wagner pendant la composition des Maîtres chanteurs, toutes les après-midi