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Page:Kufferath - L’Art de diriger l’orchestre, 1890.djvu/105

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l’orchestre

Telle est l’attention et la pénétration avec laquelle il analyse la composition qu’il a à diriger qu’il la sait par cœur au moment de prendre en main le bâton de mesure. Après la répétition il repasse encore une fois la partition, comme pour s’assurer que l’exécution qu’il vient de conduire répond bien aux intentions de l’auteur et pour mieux fixer dans sa mémoire l’effet sonore des différentes parties de la composition. C’est une faculté toute spéciale, chez M. Richter, que cette surprenante facilité d’assimilation, et l’on ne saurait le proposer sous ce rapport que comme un phénomène à admirer.

Mais ce qui est à imiter chez lui, c’est sa méthode de travail et la conscience avec laquelle il étudie dans ses moindres détails les compositions qui lui sont confiées.

Au pupitre, M. Hans Richter s’impose par la simplicité et aussi par la netteté impérieuse de son geste. Le rythme est indiqué avec une énergie singulière, sans sécheresse toutefois. L’action qu’il exerce sur les exécutants est d’autant plus directe qu’il n’y a pas entre eux et lui l’obstacle d’une partition. Il dirige à la fois du geste et du regard.

Un détail charmant à cet égard : on sait dans le prélude de Tristan la plaintive mélodie du hautbois qui, après le premier chant des violoncelles, monte par demi-tons pour s’éteindre dans un pianissimo très doux. Pour bien indiquer l’accent de la phrase, tandis que la main droite battait la mesure, M. Richter portait discrètement la main gauche vers son cœur, en un joli mouvement, naturel et sans affectation, disant avec justesse et émotion à l’exécutant : « Jouez avec âme. » Et il fut servi à souhait. Cela, bien entendu, sans que le public