Page:Kufferath - L’Art de diriger l’orchestre, 1890.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
l’art de diriger

ter cette flexion plus incisive de la diction, qui demandent à être mises en relief, l’étude attentive de la partition ne suffit pas toujours : dans la musique moderne surtout, – et j’y comprends tout Beethoven, le Beethoven dégagé de Mozart et de Haydn, – il faut encore la connaissance du sujet traité par le compositeur, qu’il s’agisse d’une donnée fantaisiste ou d’une donnée dramatique. Le passage de l’ouverture d’Egmont cité plus haut est absolument caractéristique à cet égard. L’opposition voulue par Beethoven, et si mal rendue le plus souvent malgré la précision de ses indications (fortissimo et piano successifs), trouve sa véritable explication dans les péripéties du drame de Gœthe : l’idylle amoureuse d’un côté, de l’autre les fureurs de la guerre civile.

Malheureusement la notation musicale ne connaît qu’un nombre de signes graphiques très insuffisant pour marquer d’une façon claire et précise les subtiles nuances qui sont la vie même de toute composition musicale ; encore ceux qu’elle possède donnent-ils lieu fréquemment aux interprétations les plus divergentes. On en arrive parfois à se demander avec Wagner s’il ne vaudrait pas mieux qu’il n’y eût pas du tout de signes d’accentuation ni d’indications de mouvement, comme au temps du vieux Bach. On n’employait alors que très peu d’indications, et très sommaires. Bach pensait sans doute que celui qui ne comprenait pas son thème et sa figuration, qui n’en sentait pas en lui-même le caractère et l’expression, n’y verrait pas plus clair en lisant en tête du morceau une indication de mouvement en italien. Alors, à quoi bon !