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Page:L'Écuyer - La fille du brigand, 1914.djvu/29

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DU BRIGAND
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avoir de plus beaux modèles que ceux de la nature.

— Votre demoiselle apprend le dessin, M. Jacques ?

— Oui, monsieur, et la musique aussi ; je ne néglige rien, voyez-vous bien, pour donner à ma fille la meilleure éducation possible, dit maître Jacques avec orgueil et en toussant avec importance.

— Vous l’avez placée dans un couvent, je suppose ?

— Non pas, monsieur, je l’ai mise en pension chez une dame respectable, et là des maîtres se rendent tous les deux jours pour l’instruire dans toutes les sciences utiles et agréables.

— Voilà qui est bien, fort bien ; si tous les parents se conduisaient comme vous envers leurs enfants, Québec, rempli d’excellents talents ne le céderait peut-être en rien aux premières villes de l’Europe pour l’éducation.

Pendant cette conversation entre maître Jacques et, Stéphane, Émile et Henri en tenaient une autre à voix basse.

— Savez-vous, Henri, dit Émile, en montrant du doigt Stéphane, savez-vous que ce corps-là va devenir amoureux de la jeune fille. Sur mon âme, je parierais qu’il va en devenir fou ! Voyez-vous ces informations qu’il prend et avec quel plaisir il les reçoit ? Et puis n’avez-vous pas remarqué, il n’y a qu’un instant, ces regards brûlants qu’il lui lançait à la dérobée ? Et la belle, de son côté, ne paraissait pas tout à fait indifférente ; elle rougissait, baissait les yeux, souriait même. Tenez, Henri, il y a quelque chose là-dessous.

— Je suis assez de votre opinion, Émile. Pourtant comment Stéphane pourrait-il devenir amoureux d’une fille qu’il ne connaît nullement, qu’il n’a encore jamais vue avant aujourd’hui ?

— Bah ! Henri, on dirait que vous ne connaissez pas l’amour ; que vous ignorez qu’il prend ordinairement tout à coup, qu’une seule étincelle suffit pour l’allumer dans un cœur aussi passionné que