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LA FILLE

— Dans une auberge ! dit Julienne tout étonnée, dans une auberge !

— Oui, Julienne, dans une auberge ; que cela ne vous surprenne pas, c’était le seul asile qui nous fût ouvert ; mais ce qui devra vous surprendre autant que moi, c’est que mon père m’a paru connaître depuis longtemps cette infâme maison, et être très familier avec la maîtresse qui se nomme Mme La Troupe.

Mme La Troupe, dites-vous ?

— Oui, Julienne ; la connaîtriez-vous ? auriez-vous eu des relations avec cette femme ?

— Je vous le dirai dans un autre moment, ma chère Helmina ; continuez, s’il vous plaît. Mme La Troupe aubergiste ! répéta-t-elle à demi-voix, qui l’aurait pensé ?

— Et qui aurait pensé aussi, ma chère Julienne, dit Helmina sans prendre garde à la surprise de son amie, que mon père qui paraît tant se respecter, qui a en effet l’air si respectable, qui aurait pensé qu’il eût des connaissances comme cette Mme La Troupe ? Oh ! je souhaite bien que mes craintes ne se réalisent jamais, mais…

Helmina n’acheva pas, dans la crainte de porter à l’égard de son père, qu’elle respectait d’ailleurs, un jugement trop sévère et trop peu fondé.

— Continuez, dit Julienne, qui, pensant encore à la nouvelle situation de Mme La Troupe, n’avait pas paru prendre garde à ce que Helmina venait de cacher ; continuez, est-ce là votre grand secret ?

— S’il n’y avait que cela, dit Helmina, je me croirais trop heureuse ; sachez donc, Julienne, que dans cette vilaine auberge, j’ai rencontré…

— Un jeune homme ? dit Julienne, pour épargner à Helmina la difficulté d’un pareil aveu. Je m’en doutais, ma chère amie ; ce matin même j’ai cru m’apercevoir que votre chagrin venait de là, j’en ai fait la remarque à Madelon. Mais connaissez-vous son nom ?

— Non, Julienne, dit Helmina d’une voix entrecoupée, et en baissant la vue, je ne connais rien de