Page:L'Épée-Bébian.- Art d'enseigner aux sourds-muets, 1820.djvu/31

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exalté donna plus tard des signes manifestes de la démence, dont nous devons croire qu’il était déjà atteint à cette époque.

M. l’abbé de l’Épée n’avait qu’une passion, mais ardente comme l’est toute passion exclusive : c’était de se rendre utile à l’humanité. La prédication de la parole divine, dans les temples, lui était défendue, de même que la direction des consciences, au tribunal de la pénitence. L’interdiction dont il était frappé ôtant tout aliment à cette ardeur du bien qui le tourmentait, la rendait encore plus vive et plus dévorante. Il semble que la Providence ménageait ses forces, et les concentrait toutes à dessein, pour la grande œuvre à laquelle il était appelé, et qu’il pouvait seul accomplir.

Le hasard le conduisit dans une maison où il ne trouva que deux jeunes personnes occupées à un travail d’aiguille qui paraissait captiver toute leur attention. Il leur adresse la parole : elles ne répondent point, leurs yeux restent fixés sur leur ouvrage ; il les interroge encore : pas plus de réponse. Son étonnement était extrême ; ces deux sœurs étaient sourdes-muettes, et M. de l’Épée l’ignorait. La mère arrive : tout s’explique, elle lui apprend avec larmes son malheur et ses regrets. Le père Va-