Page:L'envers de la Guerre - Tome 1 - 1914-1916.djvu/107

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— Une jeune femme dont l’ami est mobilisé s’est établie cartomancienne sans rien connaître de cette pratique. Elle a gagné 250 francs la veille du vendredi 13.

— Une ménagère vient de s’apercevoir avec effroi que les araignées ont tendu leurs toiles entre les immuables petits drapeaux de la carte.

— Où joue-t-on du Wagner ? Aux tranchées.

— Au lendemain du raid des zeppelins sur Paris, le général Hirschauer me disait qu’on ne pouvait pas exiger d’un aviateur qu’il entrât dans le dirigeable. (Bouttieaux avait prétendu le contraire.) Mais n’exige-t-on pas un sacrifice analogue des soldats qu’on fait sortir des tranchées ?

— Chez Victor Margueritte. Le général de division D…, 59 ans, fait général sur le champ de bataille, officier d’État-Major. Il a amorcé l’offensive de Perthes en janvier 1915. On vient de le mettre dans le cadre de réserve sans lui donner de raisons. Il s’indigne des ordres, venus des hauts et lointains états-majors, d’attaquer à un jour et une heure fixés, même si la préparation d’artillerie est insuffisante et cela « pour avoir 3 lignes au bulletin journalier ». On veut un succès, coûte que coûte. Lui-même semble avoir été brisé pour n’avoir exécuté qu’au matin un tel ordre reçu à minuit et qui lui eût coûté 5 à 6.000 hommes, faute de préparation d’artillerie.

Il dit l’abnégation des hommes, leur bonne humeur. Il répète fortement : « L’exemple vient d’en bas. »

Il dénonce le gaspillage de vies humaines, assure qu’on ne passera que derrière un torrent de fer, trois rangs d’artillerie détruisant tout ce qu’on voit et tout ce qu’on devine.