Page:L'envers de la Guerre - Tome 1 - 1914-1916.djvu/162

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santé, et le supplie de lui donner d’autres infirmiers que ces odieux auxiliaires. Il lui répond, amer et confus : « Mais, madame, je suis auxiliaire. »

— Je me rappelle, chez Gabriel Voisin, peu avant la guerre, un mot du lieutenant de vaisseau C…, qui glorifiait la guerre, qui la disait nécessaire à l’industrie : « Sans la guerre, qu’est-ce qu’on construirait, monsieur ? Des ascenseurs ! » Il faut voir avec quel mépris il me jetait cela.

— Je continue d’être stupéfait des sacrifices d’hommes et d’argent que ce pays consent pour l’idée de patrie dans la guerre, alors qu’il en est avare dans la paix…

— Le 5. La retraite de Venizelos a provoqué une émotion extrême dans l’opinion.

— Oh ! oui, après cette guerre, il faudrait supprimer — mais on n’osera pas — les traités secrets, les vieux usages diplomatiques, les pouvoirs souverains, il faudrait étatiser les industries de guerre, surtout la métallurgie, les fournisseurs d’armée. Et encore, supprimerait-on l’instinct barbare, le réveil de la volupté « de crever des ventres, d’entrer dedans », la saoûlerie culminante et totale de tuer en gloire ?

— Le 9. Delcassé fait annoncer sa démission, sous couleur de maladie, au Conseil de ce jour. À cause de l’effet que cela produirait en ce moment, on lui délègue Ribot et Millerand. Poincaré dit à Ribot : « Vous représenterez l’autorité » et à Millerand : « Et toi, l’amitié ». Delcassé consent à ajourner sa décision.

Un des ministres, parlant de cette démission, dit : « C’est un coup de poignard dans le dos ». Irrité du procédé, le même avoue que Jean Cruppi a rapporté de Saint-Pétersbourg la preuve que Delcassé, y