Page:L'envers de la Guerre - Tome 1 - 1914-1916.djvu/89

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— Le 2 mars, Loti dit que l’expédition des Dardanelles sera extrêmement difficile. Un de ses anciens chefs le rabroue brutalement.

— On a mis sur les réverbères parisiens un capuchon qui rabat la lumière et fait sur le soi un immense cercle de clarté, véritable signal pour l’ennemi aérien. C’est un rien, mais c’est troublant comme symptôme de l’imbécillité de ceux qui président à nos destinées.

— Escarmouche à la Chambre. Paul-Menier proteste contre l’état de siège : « Avec l’état de siège, le premier imbécile venu peut gouverner. » À quoi Viviani, énervé : « Alors, prenez ma place. »

— Je vois souvent des officiers réservistes ou territoriaux arrêter un homme qui ne salue pas, qui n’a pas tous ses boutons boutonnés. Ils sont plus jaloux de leurs mesquins petits droits que l’officier professionnel.

— Concert dans un hôpital de blessés des yeux. Un aveugle, tête bandée, amené sur l’estrade par un camarade, chante une chanson où revient ce refrain : « Maudite soit la guerre, qui nous fait faire de ces coups-là ». Cette malédiction revenait dans une autre chanson. Ce n’est que des lèvres des blessés que ces phrases-là peuvent s’envoler actuellement.

— Pendant deux heures, au Conseil, on discute de la préséance aux Dardanelles. Les navires anglais arriveront-ils avant les français ? Il paraît que cela importe quant au prestige et quant aux fruits de l’opération.

— Paléologue, ambassadeur de France en Russie, télégraphie au gouvernement qu’il ne faut pas acheter de blé aux Russes, à cause des habitudes bien connues de corruption de leur administration.