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L'INDIVIDU

rayons cosmiques, par les substances chimiques qui résultent de la digestion intestinale des matières ali- mentaires et par l'oxygène de l'atmosphère, par les vibrations lumineuses, caloriques et sonores. Grâce à elles le monde intérieur de notre corps se continue avec le monde extérieur. Mais cette limite anato- mique est seulement celle d’un aspect de l'individu. Elle n’entoure pas notre personnalité mentale. L'amour et la haine sont des réalités. Par eux nous sommes liés à d’autres êtres humains d’une façon positive, quelle que soit la distance qui nous en sépare. Une femme souffre plus’ de la perte de son enfant que de l’amputation d’un de ses propres membres. La rupture d’une union affective amène parfois la mort. Si nous pouvions percevoir les liens immatériels qui nous attachent les uns aux autres, et à ce que nous possédons, les hommes nous apparaîtraient avec des caractères nouveaux et étranges. Les uns dépas- seraient à peine la surface de leur peau. Les autres s’étendraient jusqu’à un coffre de banque, aux or- ganes sexuels d’un autre individu, à des aliments, à certaines boissons, parfois à un chien, à une maison, à des objets d'art. D’autres nous sembleraient im- menses. Ils se prolongeraient en de nombreux tenta- cules, qüi iraient s’attacher aux membres de leur famille, à un groupe d'amis, à une vieille maison, au ciel et aux montagnes du pays où ils sont nés. Les conducteurs de peuples, les grands philanthropes, les saints seraient des géants étendant leurs bras mul- tiples sur un pays, un continent, le monde entier. Entre nous et notre milieu social il y a une relation étroite. Chaque individu occupe dans son groupe une certaine place. 11 y est uni par un lien réel. Cette place peut lui paraître plus importante que sa propre vie. S'il en est privé par la ruine, la maladie, les persé-