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LA RECONSTRUCTION DE L'HOMME

Un groupe, quoique petit, est susceptible d'échapper à l'influence néfaste de la société de son époque par l'établissement, parmi ses membres, d’une règle semblable à la discipline militaire ou monastique. Ce moyen n’est pas nouveau. L’humanité a déjà traversé des périodes où des communautés d'hommes ou de femmes, afin d'atteindre un certain idéal, durent s'imposer des règles de conduite très différentes des habitudes communes. Notre civilisation se développa, pendant le moyen âge, grâce à des groupements de ce genre. Tels, par exemple, les ordres monastiques, les ordres de chevalerie et les corporations d'artisans. Parmi les ordres religieux, les uns s'isolèrent dans des monastères, les autres restèrent dans le monde. Mais tous se soumirent à une stricte discipline physiologique et mentale. Les chevaliers avaient des règles qui variaient suivant les différents ordres. Ces règles leur imposaient, dans certaines circonstances, le sacrifice de leur vie. Quant aux artisans, leurs rapports entre eux et avec le public étaient déterminés par une minutieuse législation. Les membres de chaque corporation avaient leurs coutumes, leurs cérémonies et leurs fêtes religieuses. En somme, ces hommes abandonnaient plus ou moins les formes ordinaires de l'existence. Ne sommes-nous pas capables de répéter, sous une forme différente, ce qu’ont fait les moines, les chevaliers et les artisans du moyen âge? Deux conditions essentielles du progrès de l'individu sont isolement et la discipline. Aujourd’hui, tout individu peut, même dans le tumulte des grandes villes, se soumettre à ces conditions. Il est libre de choisir ses amis, de ne pas aller au théâtre, au cinéma, de ne pas écouter les programmes radiophoniques, de ne pas lire certains journaux et certains livres, de ne pas envoyer