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L'HOMME, CET INCONNU

ses enfants à certaines écoles, etc. Mais c’est surtout par une règle intellectuelle, morale et religieuse, et le refus d’adopter les mœurs de la foule que nous sommes capables de nous reconstruire. Des groupes suffisamment nombreux seraient susceptibles de se donner une vie plus personnelle encore. Les Doukhobors du Canada nous ont montré quelle indépendance peuvent garder, même à notre époque, ceux dont la volonté est assez forte.

Il n'y aurait pas besoin d’un groupe dissident très nombreux pour changer profondément la société moderne. C’est une donnée ancienne de l'observation que la discipline donne aux hommes une grande force. Une minorité ascétique et mystique acquerrait, rapidement un pouvoir irrésistible sur la majorité jouisseuse et aveulie. Elle serait capable, par la persuasion ou peut-être par la force, de lui imposer d’autres formes de vie. Aucun des dogmes de la société moderne n’est inébranlable. Ni les usines gigantesques, ni les offices buildings qui montent jusqu’au ciel, ni les grandes villes meurtrières, ni la morale industrielle, ni la mystique de la production ne sont nécessaires à notre progrès. D’autres modes d'existence et de civilisation sont possibles. La culture sans le confort, la beauté sans le luxe, la machine sans la servitude de l'usine, la science sans le culte de la matière permettraient aux hommes de se développer indéfiniment, en gardant leur intelligence, leur sens moral et leur virilité.