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L'HOMME, CET INCONNU

tions de vie où la création intellectuelle est impossible. Ni les laboratoires, ni les appareils, ni l'excellence de l'organisation du travail scientifique ne fournissent, à eux seuls, au savant le milieu qui lui est nécessaire. La vie moderne est opposée à la vie de l'esprit. Les hommes de science sont plongés dans une foule dont les appétits sont purement matériels, et dont les habitudes sont entièrement différentes des leurs. Ils épuisent inutilement leurs forces, et perdent une grande partie de leur temps à la poursuite des conditions indispensables au travail de la pensée. Aucun d'eux n'est assez riche pour se procurer l'isolement et le silence que chacun pouvait obtenir autrefois de façon gratuite, même dans les plus grandes villes. On n’a pas essayé jusqu’à présent de créer, au milieu de l'agitation de la Cité moderne, des îlots de solitude, où la méditation soit possible. Une telle innovation, cependant, s'impose. Les hautes constructions synthétiques sont hors de la portée de ceux dont l'esprit se disperse chaque jour dans la confusion des modes actuels de la vie. Le développement de la science de l’homme, plus encore que celui des autres sciences, dépend d'un immense effort intellectuel. Il réclame une révision, non seulement de notre conception du savant, mais aussi des conditions dans lesquelles se fait la recherche scientifique.