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Page:L'oeuvre du Divin-Aretin - Partie I.djvu/81

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Ci commence la deuxième Journée des capricieux Ragionamenti de l’Arétin dans laquelle la Nanna raconte à l’Antonia la vie des Femmes mariées.



La Nanna et l’Antonia se levèrent juste au moment où Tithon, vieux cornard tombé en enfance, voulait cacher la chemise de sa Dame, de peur que le Jour, ce ruffian, ne la livrât au Soleil, son amoureux ; l’Aurore s’en aperçut et, arrachant sa chemise des mains du vieux fou, qu’elle laissa brailler, accourut, plus fardée que jamais, bien résolue à se faire faire l’amour douze fois, à sa barbe, et d’appeler en témoignage Messire Cadran, notaire public.

Sitôt habillées, Antonia se mit vite à finir, avant que l’angélus n’eût sonné, toutes ces petites besognes qui donnaient à la Nanna plus de soucis que n’en donne à Saint-Pierre sa fabrique ; puis, l’estomac bien garni, comme fait un particulier logé à discrétion, elles retournèrent à la vigne et s’assirent au même endroit que la veille, sous le même figuier. C’était le moment de chasser la chaleur du jour avec l’éventail des bavardages ; Antonia, les mains ouvertes sur ses genoux, le visage tourné du côté de la Nanna, lui dit :

Antonia. — Vraiment, je suis maintenant bien éclairée sur le compte des Sœurs, et, après mon premier somme, je n’ai plus jamais pu fermer l’œil, rien que de penser aux folles mères et aux simples pères qui croient que leurs filles qu’ils font Nonnes n’auront plus de dents pour mordre, comme celles qu’ils marient. Misérable vie que la leur ! Ils devraient pourtant savoir qu’elles sont de chair et d’os, elles