Page:Léo - Coupons le Câble !, 1899.djvu/44

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nous, en interrogeant sa conscience, peut le reconnaître. C’est, ou plutôt ce sera, un jour, le fond de la religion humaine.

L’Humanité ne s’élève, ne peut s’élever, que par l’élévation individuelle des êtres qui la composent.

Ne disons jamais, devant un déni de justice, devant un être méconnu : « Ce n’est que cela ! » Car c’est l’Humanité même qui se plaint et gémit dans l’offensé, étendant sa plainte à toute la race, par le sentiment de solidarité qui nous anime et qui rend l’offense générale et dangereuse pour tous. Car chacun sait bien qu’il est, quoique passager, l’Humanité même.

En sacrifiant l’individu à un plan arbitraire, la société ancienne commettait donc une erreur de fait immense. Elle constituait l’injustice légale. Mais on était loin encore des méditations approfondies, et déjà subsistait un fait capital déterminant : l’hallucination religieuse. Fasciné par l’idée de divinités supérieures à lui, qui devaient avoir créé le monde et commander à l’univers, l’homme conçut l’Autorité et la Monarchie avant de se connaître lui-même. Trop faible d’ailleurs, et trop ignorant, il ne pouvait croire en soi. Il accepta donc, naturellement, la tutelle des Dieux, sous les espèces du prêtre[1].

  1. Ce n’est pas sur le droit de la force que se peuvent constituer les sociétés, puisqu’il existe déjà et n’a pas besoin de lois pour régner. Elles se constitueraient plutôt pour le modérer, tandis que le Dieu, en même temps que fort, est supposé juste.