Page:Léo - Jean le sot.djvu/20

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que s’il n’eussent été étouffés par la marmite, et du côté des maitres du logis par une grosse porte de chêne, il y avait de quoi faire accourir tout le monde, comme à l’assassinat ou au feu.

C’est alors que Jean le Sage regretta bien amèrement de s’être chargé d’un pareil garçon, eût-il dû mettre le feu à la ferme en son absence, et il eut voulu se trouver à cent lieues de là, car il se mourait de honte à penser qu’on allait les surprendre en cet état. Il eut même l’idée d’emmener son frère en cet équipage, tout de suite, mais ils pouvaient être poursuivis pour le vol de la marmite. Et comment Jean le Sot eut-il pu monter à cheval ainsi ? Enfin, il ne vit rien que de conseiller à son frère de s’aller frapper à toute force contre une grosse pierre, et de se délivrer de la marmite en la cassant.

Le crépuscule du jour commençait à peine Jean le Sot, décidé à suivre ce conseil, s’apaisa un peu, souleva la marmite par les anses, de ses deux mains, et fut conduit par son frère un peu plus loin que le seuil de la porte ; car, dans sa prudence ordinaire, craignant d’être rencontré participant à cette équipée, Jean le Sage refusa d’aller plus loin. En inclinant un peu la marmite en arrière, le malheureux coiffé distinguait son chemin deux pas en avant de lui.

Il se dirigea, sans trop savoir où, du côté de la fontaine ; là, voyant deux choses blanches, qu’il prit pour des pierres, il s’y rendit tout droit, et de toutes ses forces il y cogna sa marmite : mais tout aussitôt des cris retentirent, et les deux pierres blanches, se redressant, prirent la fuite avec de tels geignements, que Jean le Sot, tout saisi de peur, se laissa tomber, assez heureusement pourtant, puisque la marmite se cassa, non sans lui produire dans le cou une douleur horrible. Quand il se releva, il y avait une lumière dans la maison ; on s’appelait ; les gens étaient en émoi.

Jean vit bien qu’il allait être blâmé, comme toujours ; et cette crainte le prenant, malgré la joie qu’il avait d’être débarrassé de sa marmite, il voulut se sauver dans sa chambre, où, pensa-t-il, il ferait semblant de dormir. Il prit donc sa course et rentra : mais il rencontra sur