Page:Léo - Les Désirs de Marinette.djvu/3

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la tranchée une baraque en planches porte écrit en caractères noirs : Vin et liqueurs. Pendant mon absence, la civilisation était venue là. Je restais près de la haie qui borde le chemin de fer, contemplant avec une sorte de stupéfaction tous ces changements, quand une vieille femme, que j’avais aperçue de loin, me rejoignit et s’arrêta près de moi dans le sentier.

Je me rangeais pour la laisser passer, quand l’idée me vint de l’interroger sur les gens de la cabane. Elle portait un panier où se voyaient des herbes fraichement coupées ; ce devait être une femme du voisinage.

— Oh ! me dit-elle, voilà bientôt six ans qu’ils ont quitté l’endroit. C’est une histoire étrange que celle de Marinette. Il n’y avait personne de plus pauvre, et c’est une dame à présent, il est vrai, que la fortune, comme on dit, n’est pas toujours le bonheur, et elle l’a bien vu.

— Vous l’avez donc connue ? demandai-je.

— Si je l’ai connue ! je crois bien ! Je l’ai vue pas plus haute que ça, et, de temps en temps, je la vois encore ; et, tenez, c’est elle qui m’a donné tous les vêtements que j’ai sur moi ; car on ne devient pas riche à courir les champs comme je fais pour cueillir à grand peine un pauvre panier de pissenlits. Certes, si vous voulez savoir l’histoire de ces gens-là, vous ne pouviez pas vous mieux adresser.

Le visage doux et intelligent de la jeune femme de la cabane et sa distinction native m’avaient frappé ; ce que venait de dire la