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UN DIVORCE

Étienne haussa les épaules en signe d’aveu.

— Bah !… bah !… il ne faut pas vous affliger pour ça, mon cher ; c’est un peu embarrassant, j’en conviens ; mais… il faut avouer aussi que la loi de ce pays n’est pas commode en fait d’enfants[1]. S’est-elle déclarée au magistrat ?

— Non, car la pauvre enfant ne sait rien au monde ; mais elle n’a pas eu tort de se confier à moi.

— Vous avez raison, vous avez raison ; il faut être généreux. Mais pourtant, si j’étais que vous, je ne l’avertirais point. On est toujours mieux placé d’être le maître. Ça la tiendra un peu vis-à-vis de vous. À propos, ajouta-t-il en se penchant vers Étienne, on dit qu’elle est bien jolie !

— Oui, répondit tristement le jeune Sargeaz.

Mais Monadier cligna des yeux et frappa sur l’épaule d’Étienne, en s’écriant :

— Heureux coquin !

Cependant, quand il vit que son interlocuteur ne donnait pas dans ce sujet :

— Pour en revenir à ce que vous me demandiez, mon cher… en définitive, ce que vous voulez, c’est toujours, au fond, gagner de l’argent ?

— Oui, dit Étienne.

— Eh bien, c’est de savoir faire qu’il s’agit, de savoir faire tout simplement !

— Soit, alors enseignez-moi…

— Ah ! mon cher, ça n’est pas facile. Ah ! vous croyez que ça s’apprend comme cela ? Vous vous imaginez donc

  1. La recherche de la paternité existait en Suisse, et le père de l’enfant naturel était obligé de le nourrir et de pourvoir à ses besoins. Cette loi vient d’être abolie.