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Page:Léo - Un divorce, 1866.pdf/277

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UN DIVORCE

cela de sa petite main. Il n’avait pas peur, et ne voulait pas descendre quand M. Camille est venu, toujours à quatre pattes, l’apporter à mes pieds.

Une rougeur passa sur son visage à ce souvenir. Elle avait cru voir à ce moment le feint coursier baiser sa bottine. — Mais elle n’en était pas très-sûre.

M. Camille aime les enfants, répondit Anna. Toutes les personnes qui ont de la bonté sont ainsi.

— Oh ! il est très-bon, très-sensible !… Il n’est pas heureux. Il se plaint de n’avoir jamais eu que des déceptions. Il dit qu’il ne connaîtra jamais le bonheur. Je ne sais pas pourquoi, car enfin…

— Il te fait donc ses confidences ?

— Oui… quand par hasard madame Renaud n’est pas là, et quelquefois même devant elle, il me dit bien des choses, certains mots que je saisis seule. Tu comprends, il n’a pas d’amis ; je ne sais pas en effet avec qui il pourrait se lier ici. Il aime son art passionnément ; cela le console.

— Ne va-t-il pas retourner en France ?

— Mais… il le devait ; puis maintenant il préfère… je ne sais pourquoi, rester ici… Qu’a donc Fernand ?

L’enfant s’agitait en criant sur les genoux de sa jeune tante. Celle-ci le mit à terre, et, prenant une agate, la fit rouler devant lui. Soutenu par Anna, il se mit à courir après, mais en criant toujours et comme furieux d’être obligé de jouer. Et cependant ses petits pieds se devançaient l’un l’autre avec une ardeur fébrile à la poursuite de l’agate ; au moment où il allait l’atteindre, Anna la poussait du pied ; il bondissait, recommençait à courir et riait aux éclats, quand tout à coup il se renversa en arrière en poussant des cris douloureux. Claire était accourue, mais ni ses caresses, ni ses prières ne calmèrent