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Page:Léo - Un divorce, 1866.pdf/322

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UN DIVORCE

de mauvaises affaires. Moi, je ne m’occupe pas de ça, et, quand le monde m’en parle, je dis, comme madame : Ça n’est pas vrai. Dieu merci ! je n’ai pas la langue trop longue ; et puis j’aime madame comme ma mère. C’est bien ce que monsieur voit, et c’est pourquoi il est toujours à me gronder et à ne trouver rien de bien de ce qu’on fait. Et je peux dire que, si ce n’était madame et les enfants, je ne voudrais pas rester ici ; car on n’aime pas quand les choses vont comme ça dans un ménage. Mais je sais bien que ce n’est pas la faute de madame, et…

— Ne parlons pas de cela, Louise, dit madame Desfayes, en l’interrompant avec douceur.

Elle croyait à la sympathie de cette fille ; mais de telles confidences la faisaient souffrir cruellement. Elle but à la hâte une tasse de thé, mangea quelques bouchées et mit son châle. Mais en voyant qu’elle allait sortir, Louise se répandit en exclamations et doléances.

— Madame ne peut pas sortir toute seule comme ça à cette heure. Je vas prendre le falot et accompagner madame. Je ne veux pas laisser madame sortir comme ça.

Claire apaisa difficilement ses importunités et ses questions. Elle-même n’était pas rassurée, au moment de s’aventurer seule pour la première fois dans une ville mal éclairée et mal fréquentée le soir. Mais le sentiment qui la poussait lui faisait surmonter ces craintes. Elle sortit, son voile baissé, le cœur agité, mais occupée uniquement de cette inquiétude : Où le trouverai-je ?

Car elle allait à la recherche de son mari pour l’adjurer, au nom de la foi donnée, au nom de leurs souvenirs et au nom de leurs enfants, d’abandonner cet amour coupable et de revenir au milieu des siens. Elle sentait si profondément combien sa demande était juste et tout