Page:Léo Taxil - La Vie de Jésus.djvu/294

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
292
LA VIE DE JÉSUS

CHAPITRE LVI

LAVEMENT DE PIEDS EN FAMILLE

Ouvrons une parenthèse au commencement de ce chapitre, pour raconter à ceux de nos lecteurs qui l’ignorent, comment se passait chez les Juifs la cérémonie principale de la Pâque.

Cette cérémonie était un banquet, vu qu’il n’y a pas de fête sans un petit gueuleton.

Dans les premiers temps d’Israël, on suivait, pour ce festin, un rituel assez curieux. D’abord, tout le monde dînait debout ; les chaises, et jour-là, étaient reléguées à l’antichambre. Chacun avait une corde autour des reins et gardait ses sandales. En outre, les convives tenaient à la main gauche un bâton et boulottaient avec une précipitation extraordinaire, comme de nos jours on mange dans les buffets de chemins de fer. Menu : un agneau entouré de chicorée sauvage ou d’autres herbes amères ; le pain était sans levain.

Depuis la captivité des Hébreux à Babylone, les curés juifs changèrent tout ça. L’obligation de rester debout fut supprimée, et le bâton put être laissé au vestiaire. Par exemple, l’agneau et le pain sans levain demeurèrent obligatoires.

L’agneau était cuit dans le four et devait conserver une forme particulière : on l’attachait à deux branches de grenadier, bois moins sensible que tout autre à l’action de la chaleur ; l’une de ces branches le traversait tout entier, tandis que la seconde, plus courte, tenait les pieds étendus. Ces apprêts étaient l’objet de scrupuleuses précautions. Il était absolument défendu de briser aucun os de ce fameux agneau pascal. Malheur à celui qui briserait un os, même par inadvertance : il devait recevoir, séance tenante, quarante coups de fouet (Pesachim, VII, 11). La nuit venue, les convives, dont le nombre allait de dix à vingt, s’étendaient sur des lits peu élevés, le bras gauche appuyé sur un coussin, la main droite gardant la facilité de saisir la pitance.

Vous allez me dire : Pourquoi, ce jour-là, les Juifs mangeaient-ils couchés ? — Voici l’explication : d’après les usages, la position horizontale, pendant le repas, était le privilège des hommes libres ; or, la Pâque avait pour but de célébrer l’anniversaire plus ou moins exact du jour où le père Moïse avait affranchi les Hébreux de la domination égyptienne.

Le maître de la maison commençait par prendre une coupe, y versait du vin, avec un peu d’eau, et disait majestueusement :