Pendant quinze jours, un mois, il a espéré faire revenir sa femme à de meilleurs sentiments ; il l’a exhortée et lui a débité de long discours pathétiques sur la fidélité conjugale. Mais, s’étant bientôt convaincu que ses efforts étaient inutiles et qu’il en était pour ses frais d’éloquence, il a renoncé à toute nouvelle tentative et a pris bravement son parti.
Le soir, il promène son front rêveur dans les couloirs des théâtres, jetant parfois un regard mélancolique du côté des loges grillées.
Il souffre de son infortune, mais il la supporte avec courage. — Un bon point pour le cocu résigné.
VI
Le Cocu récalcitrant.
Plus que navré, celui-ci. Furieux ! furieux !! furieux !!!
Il trouve la plaisanterie supérieurement mauvaise.
Ses amis ont beau le sermonner, lui dire qu’un homme doit être fier et heureux de contribuer — même indirectement — au bonheur de ses semblables ; il ne veut pas entendre raison, il regimbe, il cric, il tempête, il ne peut pas s’y faire.
Si on lui fait observer que les adorateurs de sa femme sont tous des gens très comme il faut, du meilleur monde, haut placés, et qu’il est peut-être sur le chemin de la fortune et des honneurs, il fait une scène, dit qu’on se moque de lui, et déclare magistralement que le mot « honneur ? » n’a plus au singulier la même signification qu’au pluriel.
S’il n’étrangle pas sa peu chaste épouse, c’est parce qu’il a peur de ta Cour d’assises ; aussi, pour se venger, il va quelquefois, par dépit, lorgner les flûtes d’une danseuse en renom.
Les jours d’élections, le cocu récalcitrant vote toujours pour le candidat légitimiste, histoire de protester énergiquement contre le partage et la communauté des biens.
VII
Le Cocu qui en est sûr.
Ce n’est pas un type, c’est une espèce, un genre, une généralité. Néanmoins, le cocu qui est sûr de son affaire doit entrer dans cette galerie, ne serait-ce que pour amener le cocu qui en doute et le cocu qui n’y croit pas.