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LES TROIS COCUS

croche, et il priait les spectateurs de constater que la belle Tatakoukoum était entièrement négresse.

La scène capitale de l’opéra était celle du mancenillier ; les spectateurs l’attendaient en trépignant d’impatience.

Vasco de Gama a entremêlé un peu de tyrolienne à ses chants d’amour :

Vers toi, mon idole,
Laïtou !
Tout mon cœur s’envole,
Laïtou !
Et pour toi j’immole,
Laïtou !
Ma gloire à venir.
Troulala,
Troulala,
Lanlaire,
Troulala lala laïtou !

D’amour frémissante,
Laïtou !
Mon âme est brûlante ;
Laïtou !
L’espoir et l’attente,
Laïtou !
La font tressaillir.
Troulala,
Troulala,
Troulala,
Troulala, lala laïtou-ou-ou !

C’est du Meyerbeer arrangé, ne public d’Argelès, qui ne connaît l’Africaine que par ouï-dire, est charmé de cette musique aussi extraordinaire que la troupe. On bat des mains à se les rompre. On jette aux artistes des couronnes champêtres, des bouquets rustiques, dans lesquels il y a du thym et toutes sortes de fleurs sauvages. Bref, c’est un triomphe colossal : le qualificatif, du reste, est d’actualité.

Les spectateurs s’intéressent de bonne foi à la jalousie d’Inès ; ils trouvent que Vasco de Gamo est un grand navigateur, mais que, comme homme privé, il est d’une perfidie atroce à l’égard de cette pauvre Sélika. Somme toute, selon ta donnée même de l’opéra sérieux, l’Africaine est, on le sait, une par trop bonne fille ; et quelques braves gens d’Argelès ne se gênent pas pour le lui dire, lorsqu’elle ordonne à Néfusko de favoriser le départ de son infidèle époux avec Inès, c’est-à-dire avec Mlle Zodiaque.