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LES TROIS COCUS


CHAPITRE VI

LES PARFUMS DE LA MUSE


Tandis que nous sommes à Marseille, demeurons-y encore un peu. — L’année dans laquelle le colonel Campistron épousa mademoiselle Pauline de Bellonnet, fut marquée par un autre mariage, dont l’historique est nécessaire pour que nos lecteurs comprennent Lieu la suite de ce récit.

Le chef-lieu des Bouches-du-Rhône est renommé, chacun sait ça, pour sa quantité phénoménale de water-closets. On ne peut pas faire un pas à Marseille sans se heurter à un de ces établissements, dont il faut bien reconnaître la nécessité, mais qui toutefois dans la cité phocéenne sont en trop grande abondance. Partout on aperçoit de belles boutiques à devanture en couleur tendre avec cette inscription au sommet : Lieux d’aisance, 5 centimes. À Marseille, cela ne coûte que cinq centimes. C’est la loi générale de l’offre et de la demande : plus grande est la concurrence, plus le commerce est obligé de baisser ses prix. Allez à la place du Grand-Théâtre, à Marseille, votre regard sera frappé par l’innombrable multitude de cabinets inodores qui s’offrent aux clients pressés. Le long des quais qui entourent les ports, c’est une succession d’établissements du même genre ; là, les enseignes portent des inscriptions dans toutes les langues du globe ; touchante attention pour les marins de nationalités si diverses qu’amènent chaque jour mille et mille vaisseaux. Aux Allées, sur la Canebiére, à la Plaine, derrière la Bourse, partout enfin, même multiplicité de reposoirs hygiéniques, chacun vantant en grosses lettres la supériorité de son système. Mais c’est surtout sur le Cours que les lieux d’aisance marseillais se font une concurrence acharnée ; en ce point de la ville, ils sont du reste plus luxueux que partout ailleurs : lavabo à la sortie, petits becs de gaz pour rallumer les cigares, salon de décrottage, papier à discrétion, bref, toutes les commodités.

En 1874, deux de ces maisons du Cours étaient en guerre. Elles étaient situées vis-à-vis l’une de l’autre. La première,