Page:Léon Daudet – Alphonse Daudet.pdf/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
111
LE MARCHAND DE BONHEUR

morable séparation du cœur d’avec les vaisseaux, les rancunes se perpétuèrent. Vous en trouveriez encore quelques reflets dans les polémiques de la presse provinciale, de cette presse que tuent le télégraphe et la rapide propagation des nouvelles. »

Je puis bien rappeler le tour des paroles et le sens général du discours, mais ce que je suis impuissant à reproduire, c’est la pittoresque levée d’arguments, l’éclair des regards, le cher sourire, les gestes minutieux de la main tenant le porte-plume.

« Ce n’est pas à vous, chère amie, que j’apprendrai les ressources considérables de la province, matérielles et morales, pour parler comme un député ; mais ce que nous sentons l’un et l’autre, plus vivement que n’importe quel parlementaire, c’est la nécessité de donner un peu d’air et de vie à ces membres que la tête est en train de fatiguer et de ruiner. Décentralisation est un de ces grands mots qui ne disent rien à l’esprit. Avec votre Revue, vous avez une arme. À votre appel répondront les professeurs d’Université, les journalistes instruits et renseignés qu’on trouve dans la presse provinciale subsistante. Ainsi, vous constituerez, chez vous, une sorte de ministère fédéraliste où vous accepterez les réclamations régionales ; où, sans épouser les querelles de clocher, vous nous tiendrez au courant de ces